Le 22 novembre 2023, le Cercle des Analystes Indépendants a organisé sa conférence annuelle, parrainée notamment par la SFAF. Trois tables rondes ont réuni analystes financiers, gérants de portefeuille et économistes afin de discuter de la question de l’importance de l’IA pour les perspectives des marchés financiers 2024. Eric Galiègue, président du Cercle des Analystes Indépendants, membre de la SFAF et président de sa commission Evaluation, revient sur cet événement.
Intelligence artificielle et analyse des entreprises : la position des analystes financiers
Participants : Gilles Bazy-Sire, Equity GPS, François d’Hautefeuille, SFAF – Evariste Quant Research, et Lionel Pellicer, SFAF – Phiadvisor Valquant
Modérateur : Hubert Tassin, Boursing
L’Intelligence artificielle (IA) résulte de l’accroissement exponentiel des données disponibles et de la puissance de calcul des ordinateurs. C’est, à n’en pas douter, une évolution majeure, qui entraînera des conséquences considérables pour le métier d’analyste financier. Elle automatise de nombreuses taches dans un contexte d’interpolation (à partir de données connues dans un espace de dimension N), alors que l’analyste extrapole dans un contexte de subjectivité. Cette différence est essentielle afin de considérer que les outils de l’IA constituent des auxiliaires extrêmement précieux (synthèse des données connues), mais ne remplaceront pas l’opinion profondément humaine de l’analyste financier. Elle permettra aux analystes de passer plus de temps avec leurs clients investisseurs et avec les entreprises. L’IA ne devrait pas se concentrer pour former une « pensée unique ». Au contraire, elle va se multiplier en de nombreuses autres IA. On pourrait même considérer qu’il y aura dans le futur autant d’IA que d’analystes !
Intelligence artificielle et choix des actions pour 2024 : la position des gérants de portefeuille
Participants : Eric Bleines, SFAF – Swiss Life Gestion Privée, Marc Favard, SFAF – Promepar Asset Management, et Daniel Tondu, SFAF – Gestion 21
Modérateur : Romain Dion, journaliste pour Le Revenu
Le déploiement de l’IA n’en est qu’à ses débuts et, comme pendant la ruée vers l’or, ce sont les vendeurs de pelles et de pioches qui seront très probablement les gagnants. L’IA elle-même n’est pas une révolution : elle s’inscrit dans la mutation digitale de l’économie et suscite des problèmes majeurs de société, d’intelligence collective et individuelle. Elle concentre une valeur considérable autour des « 7 merveilles de Wall Street » (Microsoft, Nvidia, Tesla, Meta, Apple, Alphabet et Amazon), ce qui choque forcément les gérants « fondamentaux ». Pour l’industrie de l’investissement, les gains de productivité dans le domaine du reporting et de l’analyse des entreprises seront considérables. Ils permettront de consacrer plus de temps à la communication avec les clients. L’impact de l’IA sur les perspectives 2024 est déjà significatif : elle permet de s’intéresser à la reprise des investissements des entreprises, mais aussi aux applications IA qui généreront un chiffre d’affaires déjà significatif. Néanmoins, le choix d’actions impliquées directement dans l’IA est limité.
Intelligence artificielle et perspectives 2024 : la position des économistes
Participants : Jean-Luc Buchalet, Pythagore Consulting, Eric Galiegue, SFAF – Phiadvisor Valquant, et Véronique Riches Flores, Riches Flores Research
Modérateur : Jean-François Filliatre directeur éditorial pour Marchés Gagnants et « Et + encore »
L’IA s’inscrit dans le prolongement de la révolution des technologies de l’information et de la communication, qui marque notre société depuis plus de 20 ans. Elle est aussi importante que l’avènement de la machine à vapeur au XIXème siècle et de l’électricité au XXème. L’IA constitue un bouleversement sociétal indéniable dans de nombreux domaines, encore très largement ignorés. Sera-t-elle plus efficace en termes de productivité que ne l'a jusqu'alors été l'essor des nouvelles technologies ? Tout dépendra, pour une large part, de la distribution des revenus qu'elle procurera qui, seule, transforme les gains de productivité en croissance potentielle et en essor de l'investissement. L’IA induit des gains de productivité considérables, notamment pour les sociétés qui recourent le plus au facteur de production « travail » : services commercial, technologique, industriels et de santé, dont les frais de personnel sont les plus élevés en % des ventes (plus de 30%). La Chine semble avoir perdu la bataille de l’IA contre les USA, qui sont les grands gagnants. Par exemple : SMIC est la seule entreprise chinoise capable rivaliser avec les Taiwanais (TSMC), mais avec des microprocesseurs de troisième génération de seulement 28 nm.
La synthèse de la journée et la vidéo récapitulative des tables rondes sont disponibles via ce lien.