A compter de juillet 2026 au plus tard, davantage d’entreprises françaises devront se conformer à la CS3D, la directive européenne sur le devoir de vigilance. Celle-ci leur imposera de nouvelles obligations de transparence sur les incidences négatives de leurs activités sur l’environnement et les droits humains. Précisions d’Alexiane Bellone, responsable des commissions et groupes sectoriels de la SFAF.
Plus communément connue sous son acronyme CS3D(1), la directive européenne sur le devoir de vigilance est entrée en vigueur le 25 juillet dernier, soit 20 jours après sa publication au JOUE(2).
Celle-ci s’inscrit dans le cadre du « Green Deal » européen (Pacte Vert pour l’Europe) et a pour objectif principal d’imposer aux entreprises concernées (ainsi qu’à leurs filiales et partenaires commerciaux) la publication d’informations sur les incidences négatives de leurs activités et de leur chaîne d’approvisionnement sur les droits humains et l’environnement.
Elle sera transposée progressivement par les Etats Membres dans le respect d’un délai de deux ans.
Les entreprises concernées
La directive CS3D s’appliquera aux très grandes entreprises remplissant les conditions suivantes :
- Les entreprises européennes employant plus de 1 000 personnes (et dont le chiffre d’affaires net dans l’UE dépasse 450 000 000 euros par exercice financier dans l’UE) ;
- Les sociétés mères européennes d’un groupe employant plus de 1 000 personnes (et réalisant un chiffre d’affaires net de plus de 450 000 000 euros par exercice financier dans l’UE) ;
- Les franchises européennes qui ont généré plus de 80 000 000 euros nets par exercice financier de chiffre d’affaires dans l’UE (dont au moins 22 500 000 euros ont été générés par les redevances) ;
- Les entreprises non européennes qui génèrent dans l’UE le chiffre d’affaires net indiqué ci-dessus.
Les PME ne sont pas directement concernées par la réglementation. Cependant, elles peuvent être affectées par la CS3D en tant que sous-traitants ou fournisseurs d’entreprises visées.
De nouvelles obligations
Afin de se conformer à la CS3D, les entreprises sont ainsi invitées à identifier, prévenir, atténuer et solutionner leurs incidences négatives (réelles ou potentielles). Pour se faire, elles devront mettre en place une stratégie de gestion des risques, revoir leurs politiques d’entreprise et assurer un suivi régulier de l’impact de leurs activités ainsi que de celles de leurs filiales ou de leurs partenaires commerciaux.
Ces entreprises devront ainsi intégrer une diligence raisonnable en matière de développement durable et tenir un registre des initiatives afin de faciliter la préparation et la publication du rapport annuel appelé plan de transition.
Quand prend-t-elle effet ?
La CS3D doit être transposée en droit français au plus tard le 26 juillet 2026. Les entreprises disposeront alors d’une période progressive jusqu’en 2030 pour se conformer à leurs nouvelles obligations.
La France pionnière en la matière de devoir de vigilance, quelles évolutions prévue par la directive européenne ?
Dans ce domaine, la loi française relative au devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d’ordre adoptée en mars 2017(3) a été pionnière. Les grandes entreprises ayant leur siège social en France ou les filiales contrôlées par une entreprise française et employant plus de 5 000 salariés en France ou plus de 10 000 salariés dans le monde doivent établir chaque année un plan de vigilance.
La directive européenne va cependant plus loin. En effet, elle prévoit un devoir de vigilance plus élargi, qui s’applique aux activités de l’entreprises et à toutes ses relations d’affaires en amont et en aval de l’entreprise elle-même (alors que la France limitait le périmètre de vigilance aux activités de l’entreprise et de ses filiales). La CS3D intègre toute la chaîne de valeur.
Elle est également plus exigeante en matière de contenu en exigeant l’intégration des principes de vigilance dans les politiques internes et les pratiques de management de l’entreprise. Par ailleurs, les mesures de prévention prévues sont plus nombreuses et plus strictes.
Quelles implications pour les acteurs financiers ?
Les acteurs financiers ne sont pas totalement épargnés par la CS3D. Dans le cadre de la directive, les organismes financiers réglementés ne seront pas responsables pour le compte des activités de leurs contreparties qu’elles financent (« downstream activities »). En revanche, elles devront publier des informations sur les incidences négatives de leurs propres activités et de leur propre chaîne d’approvisionnement (« upstream activities »).
Toutefois, le texte prévoit qu’un délai de réflexion de 2 ans est fixé afin de déterminer la nécessité d’inclure les activités aval (“downstream activities”) dans le champ d’application de la directive. La législation française, plus stricte, ne fait pas la distinction entre entreprises financières et non-financières et impose déjà aux acteurs financiers la publication d’informations sur leurs « downstream activities ».
Par ailleurs, comme toutes les entreprises dépassant les seuils prévus par la directive, les entreprises financières doivent également publier un plan de transition.
(1) Corporate Sustainability Due Diligence Directive.
(2) Journal Officiel de l’Union Européenne.
(3) Loi n°2017-399.