L’impact de taux d’intérêt très bas sur les marges, la digitalisation – ainsi que la hausse des fonds propres pour les banques – ont fortement pesé sur la valorisation des banques, un peu moins sur celle des assureurs. Explications d’Antoine Houssin, responsable du groupe sectoriel Banque-Assurance de la SFAF.
Les agences de notation situent les deux secteurs en Europe majoritairement à des niveaux satisfaisants, à l’instar de Moody’s, qui note en senior les banques et les assureurs européens en moyenne à « A ». Les spreads de crédit ont été, au cours des dix dernières années en moyenne, comparables à ceux des corporates à rating équivalent, en dehors de nouveau cycle d’investissement ou de crise systémique.
S’agissant des taux LT, leur hausse est positive pour les banques, côtés actions et crédit. Pour les assureurs, elle est aussi positive globalement sur leur solvabilité. Cependant, elle est négative sur les valorisations des portefeuilles obligataires et généralement négative sur ceux en actions.
Concernant le secteur bancaire européen, Guy Combot, analyste senior vice-président chez Moody’s, explique que « Moody’s maintient une perspective globalement stable malgré la détérioration de la situation économique depuis le conflit en Ukraine. Ces dernières années, les banques ont procédé à un assainissement de leur bilan et affichent désormais un bon niveau de capital (15% de CET1) pour affronter une éventuelle dégradation de la qualité de crédit de leurs emprunteurs. La rentabilité des banques s’est, par ailleurs, améliorée en 2021 et jusqu’ici en 2022. Les banques vont graduellement bénéficier de la hausse des taux. Cela devrait plus que compenser un possible tassement des volumes de prêts, d’éventuelles provisions complémentaires pour couvrir les risques de crédit et la fin annoncée du « carry trade » résultant du recours massif à la facilité TLTRO de la BCE. »
S’agissant des assureurs, Louis Nonchez, analyste associate et vice-président Assurance chez Moody’s, affirme que « de manière générale, Moody’s s’attend à ce que le secteur de l’assurance en Europe bénéficie de la hausse des taux, que ce soit en Vie (via la hausse des marges), ou sur le segment Dommages (via le résultat des placements, qui reste une composante importante de la rentabilité). Toutefois, le niveau actuel exceptionnellement élevé de l’inflation peut représenter un défi de taille, en particulier pour les assureurs du segment Non-Vie (en Auto et Habitation en premier lieu), en raison du coût des sinistres qui devrait peser négativement sur les résultats. »
Sur un autre plan, force est de constater que les deux secteurs n’ont pas plié sous le poids de la concurrence digitale, en proposant leurs propres services et en tenant tête aux fintechs, sinon en les rachetant et en les intégrant à leur business model. Cependant, il existe des risques nouveaux. En assurance, il y a les rachats de contrats, le climat et la cybersécurité. Les banques sont aussi concernées par le climat et la cybersécurité. Par ailleurs, les banques et les assureurs sont face à un risque géopolitique : la guerre en Ukraine et son impact sur la croissance.
Ainsi, nous nous éloignons de la lecture qui a prévalu au cours des dernières années concernant leur compétitivité. Cependant, nous constatons l’émergence de risques nouveaux et la dégradation de l’économie. Par ailleurs, le régulateur augmente les exigences de FP prudentiels des banques, ce qui est négatif côté actions. S’agissant des assureurs, le régulateur n’est pas plus exigeant, ce qui nous semble justifié. En conclusion, à la question de savoir si une vision nouvelle, optimiste, est permise, nous sommes partagés, bien que des progrès en matière de compétitivité aient été réalisés. Ce qui est, selon nous, particulièrement important à retenir, du fait de la nature nouvelle des risques et de degrés d’expositions différents, c’est qu’une évaluation acteur par acteur est selon nous plus que jamais nécessaire.
La version complète de cette étude, réservée aux membres de la SFAF, est disponible via ce lien. Elle peut être téléchargée au format PDF via ce lien.