En décembre 2019, l'European Securities and Markets Authority (ESMA) a publié un rapport analysant l'utilisation par les émetteurs des indicateurs APM (Alternative Performance Measures) – indicateurs non prévus par les normes comptables – et le respect avec les principes de l'ESMA. La marge d'amélioration serait importante. Analyse de Pascale Mourvillier, expert en information financière, administrateur et membre de la commission Comptabilité de la SFAF.
On sait que Warren Buffet a la réputation de se méfier de l'EBITDA et le rapport de l'ESMA de décembre 2019 semble lui donner raison.
Dans ce rapport, pour contribuer au projet de l'IASB (International Accounting Standards Board) sur les « Primary Financial Statements », l'ESMA analyse les indicateurs APM (Alternative Performance Measure) ou non-GAAP - c'est-à-dire non prévus par les normes comptables comme les IFRS ou les normes US. L'autorité de marché se penche aussi sur la conformité avec les principes établis par l'ESMA en la matière. En effet, l'ESMA autorise les APM avec, cependant, une utilisation très encadrée. En particulier, les émetteurs doivent définir et justifier les APM utilisés et fournir une réconciliation avec les chiffres IFRS.
Comme le constate l'ESMA, la marge d'amélioration est importante !
En effet :
- seuls 16 émetteurs, sur un total de 123 revus par l'ESMA, respectent totalement les principes de l'ESMA ;
- certains secteurs comme les communications (selon la classification Bloomberg, utilisée par l'ESMA : les télécoms, les media et loisirs) ou les utilities utilisent en moyenne plus d'APM que d'autres. En outre, plus la capitalisation boursière est importante, plus grande est l'utilisation d'APM ;
- les APM concernent en majorité le compte de résultat et sont souvent des indicateurs ajustés (i.e. EBITDA ajusté…) ; en effet, on peut s'interroger sur le bien-fondé de l'exclusion des coûts de restructuration ou des dépréciations d'actifs d'un indicateur de la performance ;
- enfin, les ajustements faits par les émetteurs sont très divers ainsi que les libellés utilisés. La SFAF avait pu faire les mêmes constats à l'occasion de son analyse de l'information sectorielle selon IFRS 8 en Europe (juin 2013).
Le rapport complet de l'ESMA est disponible sur son site.
Notons que l'ESMA rappelle aux émetteurs que la transparence des indicateurs utilisés et l'utilisation d'une terminologie appropriée sont cruciales pour permettre aux investisseurs/utilisateurs d'évaluer et de comparer correctement les informations données par les entreprises.
Investisseurs, soyez vigilants !