Comme chaque année, le Cliff, l'Association française des professionnels de la communication financière, a publié le guide « Cadre et pratiques de communication financière ». Parmi les nouveautés, figure l'entrée en vigueur du document d'enregistrement universel, effective depuis le 21 juillet 2019. Olivier Psaume, Président du Cliff et directeur des Relations Investisseurs de Sopra Steria, évoque les conséquences pratiques de cette évolution pour les entreprises qui travaillent aussi sur la mise en place de l'ESEF (European Single Electronic Format).
Début juillet 2019, le Cliff a publié la 12e édition annuelle du guide « Cadre et pratiques de communication financière ». Quelles étaient les principales nouveautés cette année ?
Parce qu'il est avant tout un outil didactique, ce guide est très attendu chaque année ! La principale nouveauté 2019 est l'entrée en vigueur, depuis le 21 juillet, du document d'enregistrement universel (Universal registration document – URD), qui va succéder au document de référence et s'en inspire d'ailleurs beaucoup.
Les autres actualisations concernent en particulier les nouvelles dispositions introduites par la loi PACTE, notamment en matière d'informations sur les rémunérations, les conventions réglementées ou l'identification de l'actionnariat, de même que le renforcement des pouvoirs de sanctions du Haut Comité de Gouvernement d'Entreprise, les nouvelles dispositions relatives au vote en AG, les nouveautés sur les contrats de liquidité, sur les programmes d'Equity lines, ainsi qu'un certain nombre d'exemples de la jurisprudence de l'AMF sur les différentes sanctions .
Quelles sont, pour les entreprises et les IR, les implications majeures de la mise en place du Document d'enregistrement universel ?
Par rapport au document de référence, les émetteurs doivent fournir de nouvelles informations sur la stratégie et l'information extra-financière et présenter différemment les facteurs de risques (risques significatifs en nombre limité de catégories, hiérarchisation, quantification…), ce qui est souvent complexe et nécessite un travail collégial dans l'entreprise. Ce nouveau document est aussi allégé de quelques éléments, comme notamment le rapport des commissaires aux comptes sur les prévisions de résultats.
Nous n'avons pas à ce jour tous les détails d'application, notamment concernant les facteurs de risques, puisque les guidelines définitives de l'ESMA (European Securities and Market Authority) n'entreront en vigueur qu'à la fin de l'année. La principale difficulté reste de concilier ces nouvelles exigences avec celles, en France, du Code de commerce pour l'établissement du rapport de gestion, partie intégrante du document de référence, ainsi que l'articulation avec la section dédiée du résumé du prospectus. Il appartient donc à l'IR de repenser la cohérence entre ces différentes publications réglementées afin de répondre à l'objectif du règlement Prospectus 3 qui est de rendre l'information plus lisible et plus synthétique.
Une autre échéance est prévue pour le début 2020 avec la mise en place du format ESEF. À l'heure où se développe l'information extra-financière, pensez-vous que l‘ESEF représente une réponse aux défis actuels de la communication financière ? Comment le Cliff traite-t-il cette question ?
L'objectif de l'ESEF, qui va se traduire par l'obligation de publier le rapport financier annuel au format XBRL, est de faciliter la comparabilité de l'information. Le sujet n'est pas nouveau, la technologie adoptée non plus.
Dans un premier temps, pour les exercices 2020 et 2021, seuls les états financiers devront être « tagués » ; à partir de 2022, les notes devront l'être également, par blocs de texte. Mais ceci correspond à une partie seulement des informations nécessaires à la compréhension de la performance de l'entreprise : les investisseurs ont besoin de contextualisation des chiffres pour les interpréter et doivent disposer également des informations relatives à la stratégie et à l'extra-financier.
Nous sommes donc réservés sur cette obligation coûteuse pour les entreprises, qui ne répond pas à une demande des investisseurs. Nous l'avons fait savoir sans succès à la Commission européenne, aux côtés d'autres instances représentant les dirigeants des entreprises.
Une nouvelle édition de la charte de communication financière, publiée conjointement par la SFAF et le Cliff, vient d'être publiée. Il s'agit d'une mise à jour de la première version - datée de 1993 et visant à instaurer, développer, améliorer la confiance réciproque entre tous les partenaires de la communauté financière - afin de tenir compte de l'évolution des pratiques, des instruments de communication comme les réseaux sociaux et internet, et des nouvelles réglementations (directive transparence, directive abus de marchés notamment).
Entretien réalisé par Michèle Hénaff, rédactrice en chef de la revue Analyse financière
Lire à ce sujet l'article publié dans la revue Analyse financière 70 (Janvier -Mars 2019) : « Le Collège et la Commission des sanctions de l'AMF : des rôles complémentaires ».