La nouvelle façon de voir la finance mise en avant par l’investissement thématique constitue un véritable défi pour l’allocataire d’actifs. En effet, ce type d'investissement vient compléter les anciennes pratiques et méthodes d'analyse. Même si l’émergence de nouvelles nomenclatures représente une tentative de réponse, l’absence de standardisation ajoute une nouvelle couche de difficultés pour le sélectionneur. Face au fort développement de l’offre sur l’investissement thématique et en s’appuyant sur les perspectives de marché de certains gérants d’actifs, combinées à la recherche propriétaire de BSD Investing et de L'Allocataire, Marlene Hassine Konqui et Ahmed Khelifa, co-présidents de la commission ETF de la SFAF, font le point sur la place des investissements thématiques dans les portefeuilles des investisseurs en Europe.
Un fort développement de l’offre
Il existe aujourd’hui environ 700 fonds répertoriés dans la catégorie Thématique (source : Morningstar). Les fonds thématiques ne sont pas nouveaux, les tout premiers datant de la fin des années 60. En 2000, le marché européen en compte déjà près d’une vingtaine. Toutefois, il faut attendre 2018 pour que ce type de fonds connaisse une véritable explosion en termes de nombre d'émissions.
Nombre de fonds thématiques lancés par année :
L’ensemble des thématiques – qui peuvent être classifiées en 4 grandes sous-parties : technologie, sociale, monde physique (ressource) et globale – ont connu un fort développement. Cependant, l’année 2022 note un ralentissement en termes d’émissions, notamment dans le social.
Que représentent les fonds thématiques dans la gestion d’actifs en Europe ?
L’encours total de ces fonds atteint 311Md€ à fin 2022. La croissance de ces encours a été très forte, un quasi-quadruplement depuis 2017, alors que, dans le même temps, les encours de la gestion d’actifs actions n’ont crû sur la même période que de 25%. À fin 2022, les fonds thématiques représentent près de 7% des encours de la gestion d’actifs actions.
Quels flux en 2022 vers les stratégies thématiques ?
Les flux vers les thématiques ont été très soutenus de 2017 à 2021, mais un ralentissement est notable en 2022. Toutefois, la collecte demeure positive de 3.5Md€, contre un recul de 25Md€ pour l’ensemble des fonds actions en Europe. Ces flux ont été principalement dirigés vers la catégorie Physical World (transition énergétique, alimentation, logistique, transports et gestion des ressources) et ont plus que largement compensé les sorties des thématiques technologiques. Ces flux ont été répartis de manière quasi égale entre fonds indiciels et non indiciels, alors même que les fonds indiciels représentent moins de 10 % des encours.
Quels nouveaux défis soulèvent l'investissement thématique pour le sélectionneur de fonds ?
Les conséquences de l’absence de standards de nomenclature sont tellement importantes que cela impacte significativement l’univers de sélection et, donc, les décisions d’allocation. Une information aussi simple que la taille ou les flux de l’univers des investissements thématiques, largement dépendant de cette nomenclature, est déjà un défi pour le sélectionneur. Une deuxième conséquence de cette absence est de rendre complexe la comparaison entre les différentes stratégies et d'accentuer la difficulté d’une sélection optimale. Ceci met en évidence la nécessité de construire une approche appropriée, qui va au-delà de la nomenclature. Marlene Hassine Konqui et Ahmed Khelifa, les co-présidents de la commission ETF de la SFAF et auteurs de cet article, ont mis au point une nouvelle méthodologie pour comparer les fonds thématiques actifs et passifs, afin d’aider à choisir de manière efficiente tout en enlevant les biais émotionnels dans la décision d’investissement.