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20/11/2023 Réglementation

Directive comptable : les PME seront-elles encore des PME ?

Une révision des seuils prévus par la directive comptable a été entreprise par la Commission européenne. Quelles en sont les conséquences réglementaires à anticiper à l’échelle européenne et nationale ? Explications.

Mercredi 13 septembre 2023, la Commission européenne a entrepris la correction des seuils fixés par la « directive comptable »(1). En effet, l’article 3 de cette dernière, catégorisant une entreprise selon sa taille, fait l’objet de plusieurs modifications au sein d’un projet d’acte délégué soumis à consultation publique (aujourd’hui clôturée). Celui-ci révise à la hausse (25%) les critères du chiffre d’affaires et du total de bilan des micro, petites, moyennes et grandes entreprises et petits, moyens et grands groupes.
L’évolution de ces critères permettrait à certaines petites et moyennes entreprises de changer de catégorie et d’échapper aux dispositions règlementaires les concernant auparavant.

A l’échelle européenne
L’augmentation des seuils prévus par le projet d’acte délégué réduit la quantité d’entreprises concernées par la publication du rapport de gestion et d’autres informations à caractère financier, obligatoire depuis l’entrée en vigueur de la directive comptable.
En outre, pour la publication d’informations à caractère extra-financier, le constat est similaire car plusieurs directives et règlements européens encadrant le reporting extra-financier renvoient expressément aux seuils prévus par la directive comptable.

Rappel chronologique et règlementaire sur l’information extra-financière
La directive NFRD(2) (Non-Financial Reporting Directive) est entrée en vigueur en 2014 et a ainsi amendé la directive comptable en imposant la publication d’une déclaration non-financière aux grandes entreprises et grands groupes disposant de la qualité d’entité d’intérêt public et employant plus de 500 salariés.
En 2019, le règlement Taxonomie environnementale(3) a imposé aux acteurs économiques publiant une déclaration non-financière (catégorie d’acteurs soumis à la directive NRFD) la communication d’informations sur leurs activités considérées comme durables sur le plan environnemental.
En 2022, la directive CSRD(4) (Corporate Sustainability Reporting Directive) a apporté des révisions à la directive comptable et clarifié la règlementation. Désormais, la déclaration non-financière devient l’information en matière de durabilité. Celle-ci doit être publiée par les grandes entreprises (cotées ou non cotées) et les petites et moyennes entreprises possédant la qualité d’entité d’intérêt public(5).
Avec l’évolution des seuils prévus par le projet d’acte délégué :

  • certaines entreprises seront dispensées de la publication de l’information en matière de durabilité ;
  • d'autres n’auront plus à se préparer à la mise en œuvre des normes européennes de reporting de durabilité détaillées, dites normes ESRS (European Sustainability Reporting Standards);
  • le calendrier d’application prévu par la directive CSRD reprenant les catégories d’entreprises sera bouleversé.

A l’échelle nationale
Les directives européennes sont transposées en droit interne. Aujourd’hui, le droit positif français catégorise également les entreprises selon les critères cumulatifs du chiffre d’affaires, du total de bilan et du nombres moyen de salariés employés au cours de l’exercice. Cependant, 5 catégories d’entreprises sont répertoriées en droit français(6) :

  • Les micro-entreprises occupant moins de 10 personnes et comptabilisant un chiffre d’affaires annuel ou total de bilan inférieur ou égal à 2 millions d’euros ;
  • Les petites et moyennes entreprises, aussi appelées PME, occupant moins de 250 personne et comptabilisant un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 50 millions d’euros ou un total de bilan n’excédant pas 43 millions d’euros ;
  • Les entreprises de taille intermédiaire (ETI), à distinguer des PME, occupant 500 personnes et comptabilisant un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 1500 millions d’euros ou un total de bilan n’excédant pas 2000 millions d’euros ;
  • Les grandes entreprises (GE) sont celles ne remplissant pas les critères des catégories précédentes.

Les Etats membres de l’UE disposent d’une marge de manœuvre dans la transposition de la directive comptable et peuvent adapter leurs seuils sans dépasser certaines limites chiffrées.

Précision réglementaire
L’article D123-200 du code de commerce se rapproche davantage des catégories et seuils prévus par la directive comptable, mais ceux-ci s’appliquent uniquement aux commerçants visés par les articles L.123-16 et L.123-16-1 du code de commerce dans le cadre de la présentation de leur exercice comptable.
Le projet d’acte délégué prévoit une transposition des nouvelles dispositions en droit interne pour janvier 2024. Dans l’hypothèse où celui-ci entrerait en vigueur, il sera intéressant de suivre l’évolution des actes administratifs français : la transposition de cette directive interviendra-t-elle avant celle de la directive CSRD ?

(1) Directive 2013/34/UE du Parlement européen et du Conseil.
(2) Directive 2014/95/UE du Parlement européen et du Conseil.
(3) Règlement (UE) 2020/852 du Parlement européen et du Conseil.
(4) Directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil.
(5) Entreprises d’intérêt public : entreprises dont les titres sont soumis à un marché règlementé, ainsi que les banques et les compagnies d'assurances.
(6) Article 3 du Décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d'appartenance d'une entreprise pour les besoins de l'analyse statistique et économique.

 

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