L'étude Estimeo-Mazars de fin 2018 fournit l'opportunité de mieux cerner la situation des start-up early stage en France et leurs perspectives de développement dans le futur proche. Elle permet aussi de faire le point sur la nature du déploiement de ces nouvelles activités, et en particulier, au-delà des aspects humains sur l'apport des grandes transformations technologiques, numériques et des politiques d'accompagnement publiques et privées. Explications de Jean-Christophe Cotta, membre de la SFAF et du comité de rédaction de la revue Analyse financière et conseiller en investissements financiers chez Allocation & Sélection.
Tirée du traitement de plus de 200 réponses d'un sondage envoyé à 2 500 start-up early stage, l'étude permet, tout d'abord, de mieux définir ces start-up, de présenter leurs problématiques de financement, leur potentiel d'embauches ainsi que leur stratégie à l'international :
- À titre de définition, les start-up sont des entreprises à fort potentiel de croissance, qui changent les habitudes et usages de production, de distribution ou de consommation grâce aux nouvelles technologies dont la mise en œuvre permet des économies d'échelle, une forte hausse du chiffre d'affaires et le maintien d'un fort taux de rentabilité élevé ;
- L'effectif des start-up est largement composé par d'anciens salariés du secteur privé (40 %) et des serials entrepreneurs (28%), mais également, dans une moindre proportion, de jeunes diplômés (17 %), de demandeurs d'emploi (8 %), d'étudiants (5 %) et d'anciens fonctionnaires (2%) ;
- L'accès au capital forme une barrière à l'entrée évidente. Le besoin global de financement de ces entreprises est évalué à 4,3 milliards d'euros, leur besoin de financement dépendant de leur ancienneté et de l'avancement de leur projet. S'il est difficile de lever des fonds dans les deux premières années, au-delà, plus des deux tiers des start-up l'ont déjà fait. La diversification de leur source de financement vient avec l'âge : aux fonds personnels (93 %) s'ajoutent les financements publics (34 %), les prêts d'honneur (29 %), les fonds des business angel (27 %), puis les concours bancaires. Les entreprises de moins de six mois cherchent 720 000 euros en moyenne et celles de plus de 3 ans 2,6 millions d'euros ;
- Concernant leur potentiel d'embauche, les start-up sondées ont un effectif moyen de 6,6 personnes et souhaitent recruter en moyenne 4,8 personnes d'ici un an. Les start-up ayant levé des fonds ont un effectif deux fois plus important que celles qui ne l'ont jamais fait ;
- 74 % des start-up early stage envisagent de s'internationaliser ou sont déjà présentes à l'étranger. Elles s'appuient pour cela sur le dispositif public mis en place : Jeune Entreprise Innovante (JEI), Crédit Impôt Recherche (CIR) et financement BPI. En revanche, à l'opposé de leurs homologues suédoises ou israéliennes, elles ont d'abord un stade de développement domestique avant d'envisager d'exporter leur prestation.
Cette étude est aussi l'occasion de mieux évaluer l'incidence de la politique publique d'aide à l'innovation mise en place depuis de nombreuses années, de s'interroger sur la nature de leur création de valeur, la place prise par les nouvelles technologies et l'implication des pouvoirs publics dans la promotion et le soutien de ce nouveau secteur d'activité.
- En moyenne, 69 % des start-up interrogées n'utilisent pas ou ne connaissent pas les dispositifs Jeune Entreprise Innovante (JEI) et/ou le Crédit Impôt Recherche (CEI) ;
- En termes de création de valeur, leur valeur repose sur les hommes, la technologie et le relationnel (client, réseau, parties prenantes..). Plus le temps passe, plus ces trois sources de valeur se transforment en avantages compétitifs ;
- En termes de perception de la politique publique d'accompagnement, 75 % des entreprises font confiance au gouvernement pour les soutenir et les encourager ;
- Enfin, un petit nombre des entreprises s'intéresse de près au potentiel de financement initié par la blockchain, sous la forme d'ICO (Initial Coin Offering), qui pourrait offrir une source de financement alternative, sans diluer le capital. Les ICO correspondraient à un pré-achat du service de la start-up. La grande majorité se concentre sur les sources de financement traditionnel.
Au-delà de la qualité des informations contenues dans l'étude, c'est aussi ce que le rapport tait qui paraît source d'intérêt mais aussi point de départ d'un débat non politiquement correct : l'absence des concours bancaires conséquents dans leur financement au démarrage et l'absence d'un réseau européen, à l'instar de l'eldorado américain ! Deux sujets sur lesquels nous pourrions revenir ultérieurement.
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